Soyouz décolle depuis le Centre spatial guyanais, port spatial de l’Europe. Comme pour Ariane et Vega, les différents éléments du lanceur arrivent à Kourou en conteneurs sur les bateaux MN Toucan et MN Colibri. Seule différence, leur point de départ : Saint-Pétersbourg en Russie. Une campagne de lancement Soyouz dure entre 1 à 2 mois. En voici le descriptif.
Assemblage du lanceur
Arrivé au port de Pariacabo de Kourou dans une dizaine de conteneurs, le lanceur Soyouz et l’étage supérieur Fregat rejoignent par la route l’Ensemble de lancement Soyouz (ELS) du Centre spatial guyanais (CSG).
Au premier plan, le MIK où est assemblé la partie basse du lanceur Soyouz. En arrière-plan, le pas de tir avec son grand portique mobile. Crédits : CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/R Liétar, 2011.
Le lanceur est assemblé à l’horizontale dans le MIK, le bâtiment d’intégration Soyouz. Les 4 propulseurs latéraux coniques constituant le 1er étage sont reliés, l’un après l’autre, au corps central du 2ème étage (voir vidéo : Assemblage des propulseurs de Soyouz). C’est ensuite au tour du 3e étage d’être intégré. Toutes ces séquences sont réalisées par des équipes russes et durent une quinzaine de jours.
Assemblage des propulseurs sur le corps central.
Préparation de Fregat
Le vaisseau Fregat est déstocké, préparé et contrôlé au MIK. Jusqu’en 2015, il était ensuite transféré dans l’Ensemble de Préparation Charge Utile (EPCU) S3B, situé sur la zone ELA2, à environ 12 km du MIK pour être rempli en carburants. Depuis 2015, ce remplissage (qui dure plus d’une semaine) se réalise dans un nouveau bâtiment de l’ELS : le FCube (Fregat Fueling Facility).
Préparation de l’étage Fregat dans le MIK.
L’ensemble de lancement Soyouz du CSG
L’ensemble de lancement de Soyouz (ELS) a été spécialement construit pour le lanceur russe sur un site vierge situé sur la commune de Sinnamary, à 12 km au nord-ouest de l’Ensemble de lancement Ariane (ELA). Il est bâti sur le modèle de ses homologues de Baïkonour et de Plessetsk avec un centre de lancement (CDLS, visite virtuelle), un bâtiment d’assemblage (MIK, visite virtuelle) relié à la zone de lancement (ZLS, visite virtuelle) par une voie ferrée. Les travaux de terrassement ont débuté en 2004. La construction des bâtiments et du pas de tir s’est réalisée entre 2007 et 2011 sous la maîtrise d’œuvre du CNES. Elle a mobilisé plus de 700 personnes de nationalités différentes, dont 250 russes.
PRÉPARATION DE LA CHARGE UTILE
La charge utile des Soyouz est constituée soit d’un seul, soit de plusieurs satellites. Comme pour les charges utiles d’Ariane et Vega, leur préparation se déroule dans les EPCU, dans les zones S1 ou S5 (visite virtuelle de S5). Le remplissage des satellites en carburant se réalise obligatoirement en zone S5. Les satellites rejoignent ensuite la zone S3B où l’étage Fregat rempli en ergols les attend. La charge utile est alors fixée sur l’étage Fregat. Ils sont ensuite encapsulés dans la coiffe.
Pose des 9e et 10e satellites Galileo sur l’étage Fregat.
Cet ensemble (Fregat + satellites + coiffe) forme le Composite Supérieur (CS). Il mesure 12 m de haut sur 4,1 m de diamètre pour un poids de 9 à 16 tonnes. Quatre jours avant le lancement, il est transféré sur une plateforme dédiée, par voie routière, de la zone S3B jusqu’à la zone de lancement Soyouz pour ensuite être hissé sur le lanceur Soyouz qui aura été préalablement mis à la verticale.
Toutes les opérations relatives aux satellites (préparation, encapsulation et hissage sur le lanceur) sont réalisées par Arianespace.
Encapsulation de l'étage Fregat et des satellites.
CAMPAGNE DE LANCEMENT
Quatre jours avant le lancement, le lanceur Soyouz est placé sur un chariot-érecteur. Tiré par un tracteur spécial, l’ensemble rejoint par voie ferrée la zone de lancement (ZLS) située à 600 m de distance du MIK. Une fois arrivé sur la table de béton surplombant le carneau, le chariot-érecteur érige le tri-étage à la verticale (vidéo : Vol Soyouz 16 - Transfert en zone de lancement). Un système d’accrochage appelé la « tulipe » (traduction du terme russe « tyoulpan ») se place alors autour du lanceur pour le maintenir droit.
Un gigantesque portique mobile de 740 tonnes et 52 m de haut (appelé le MBO2) est positionné autour du Soyouz pour :
le protéger des conditions climatiques guyanaises,
faciliter les interventions des opérateurs,
assurer la pose du composite supérieur.
Transfert sur rails du tri-étage de Soyouz du MIK vers la zone de lancement.
Ce portique mobile monté sur rails était une spécificité guyanaise, qui a été reprise par les russes sur le pas de tir Soyouz construit plus tard sur le cosmodrome de Vostochny. Ce portique se substitue aux passerelles à ciel ouvert, étroites et non conformes à la législation européenne. Il permet d’utiliser le même standard d’intégration des satellites pour tous les lanceurs décollant du CSG : Vega, Ariane, Soyouz. A Baïkonour, le composite supérieur est intégré à l’horizontale sur le tri-étage, dans le MIK, et non à la verticale comme au CSG.
À J-3, le composite supérieur arrive par voie routière et est hissé au sommet du lanceur par le pont roulant du portique mobile.
À J-2 se déroule une répétition générale de la chronologie de lancement pour le tri-étage, la vérification de l'étage Fregat et des tests radio électrique.
À J-1 se déroule la répétition générale de la chronologie du Fregat et des satellites.
En parallèle à ces opérations se déroule la Revue d'Aptitude au Lancement (RAL) présidée par Arianespace, impliquant l’ensemble des équipes opérationnelles russes et européennes, les organismes russes certificateurs, la base de lancement et le client satellite. Elle permet de décider ou non de la poursuite des opérations et de l’entrée en chronologie finale.
Mise à la verticale de partie basse du Soyouz par le chariot-érecteur (en bleu). En jaune et bleu : les 4 bras métalliques de la tulipe qui seront libérés par simple contrepoids lors du décollage.
À H0-9h, le compte à rebours est lancé.
À H0-5h, décision d’autoriser le remplissage en ergols du tri-étage.
À H0- 1h35min, les 3 étages du lanceur sont remplis en ergols. Ce remplissage a duré 1h15 min.
À H0-1 h10min, le portique mobile s’éloigne de 60 m du pas de tir, dégageant le lanceur Soyouz de tout obstacle.
À H0-19 s, l'ordre de lancement est donné.
À H0-16s, les moteurs du 1er et 2e étages sont allumés.
La mise en œuvre du lanceur et du pas de tir est assurée depuis le Centre de Lancement Soyouz (CDLS).
Le lanceur Soyouz VS19 sur son pas de tir le 6 novembre 2018. La fumée résulte du dégazage d'oxygène liquide.
LANCEMENT : SUIVI DE LA MISSION
La coordination des opérations menées sur le lanceur, sur l’ELS avec les moyens de la base de lancement (stations de poursuite télémesure, moyens pour la Sauvegarde vol, moyens de secours, etc…) est assurée depuis la salle de contrôle Jupiter 2, comme pour n’importe quel lancement Ariane ou Vega.
Toutes les exigences de la Loi sur les Opérations Spatiales, édictée par l’État français, s’appliquent au lanceur Soyouz. La vérification de leur bonne application est confiée au CNES, qui assure à chaque lancement la protection des populations, des biens, de l’environnement et de la santé publique.
Pour satisfaire aux exigences de la Loi sur les Opérations Spatiales (LOS) qui s’appliquent à n’importe quel véhicule décollant du CSG, le lanceur a été adapté et doté :
d’émetteurs, récepteurs et antennes compatibles avec les fréquences et le réseau de stations du CSG ce qui permet d’utiliser les mêmes moyens de réception/communication que le système Ariane et les installations existantes sur les stations de poursuite en aval de la trajectoire de vol ;
de modifications des logiciels de vol du tri-étage et de l’étage Fregat ;
d’un « kit de sauvegarde européen » (KSE) qui permet aux radars de suivre la trajectoire du lanceur et d’interrompre par commande depuis le sol, le vol du lanceur en cas d’anomalie présentant un danger pour les populations. Ce système de neutralisation manuel complète le système embarqué russe qui coupe automatiquement les moteurs en cas de défaillance.
de vannes pyrotechniques montées sur les réservoirs pour créer des voies d’eau et faciliter leur immersion, et ainsi éviter que les étages retombant en mer ne deviennent des épaves flottantes.
20e lancement d’un Soyouz depuis le CSG, le 19/12/2018, avec à son bord le satellite militaire français CSO-1.